La circulaire relative à la prime régionale encourageant la création d’un second pilier de pension au niveau local

Question orale de M. Luperto à Mme De Bue, Ministre des Pouvoirs locaux, du Logement et des Infrastructures sportives, sur « La circulaire relative à la prime régionale encourageant la création d’un second pilier de pension au niveau local ».

le Président. – L’ordre du jour appelle la question orale de M. Luperto à Mme De Bue, Ministre des Pouvoirs locaux, du Logement et des Infrastructures sportives, sur « la circulaire relative à la prime régionale encourageant la création d’un second pilier de pension au niveau local ».

La parole est à M. Luperto pour poser sa question.

Luperto (PS). – Madame la Ministre, nous avons déjà longuement abordé la problématique des pensions des agents des administrations locales dans cette commission. Nous vous avons exprimé nos désaccords quant à la politique menée tant au fédéral qu’à la région en la matière. Nous avons ainsi contesté vigoureusement la mise en place d’un incitant à la création d’un second pilier au niveau fédéral et le transfert au bénéfice de la Flandre qui en découle. J’en ai déjà fait la démonstration, chiffres à l’appui. Nous avons dénoncé également l’explosion de la charge de pension au sein des communes et des provinces. Nous avons également dénoncé les conditions dans lesquelles la région renonce désormais à prendre en charge les intérêts des prêts d’aide extraordinaire à long terme qu’effectuent les communes, notamment pour couvrir leurs charges de pension. Nous avons par ailleurs toujours dénoncé les conséquences catastrophiques de ces réformes, tant pour les actuels agents contractuels que pour les finances communales.

Il y a peu, les communes ont reçu votre circulaire relative à la prime régionale encourageant la mise en place d’un second pilier pension au sein des communes.

J’aimerais donc davantage de précisions quant aux conditions d’octroi de cette prime, et plus spécifiquement sur cet élément. Le pouvoir local devra disposer d’une étude complète, personnalisée et actualisée réalisée par un expert externe portant sur l’évaluation actuelle et future de la charge de pension du pouvoir local, sa gestion actuarielle et l’objectif financier s’y rapportant. Cette étude est le préalable obligatoire à tout octroi de primes et devra montrer la nécessité et le bien-fondé pour les finances du pouvoir local de mettre à disposition de ses agents contractuels un régime de pension complémentaire.

Pas d’étude préalable, pas de prime, donc.

Vous serez donc d’accord avec nous pour dire que cette demande est pour le moins floue.

Que signifie concrètement ce recours à un expert externe ? Qu’en est-il du coût financier de cette étude ? Quel est le profil de ces experts ? Doivent-ils être absolument des réviseurs ? Qui est habilité à réaliser cette étude ? Qui prend en charge le coût et la charge de ces frais d’études ? La région entend-elle intervenir dans ses frais d’études ? Y a-t-il, enfin, des garanties d’indépendance de ces experts ?

le Président. – La parole est à Mme la Ministre De Bue.

Mme De Bue, Ministre des Pouvoirs locaux, du Logement et des Infrastructures sportives. – Monsieur le Député, nous avons en effet déjà longuement abordé la problématique des pensions des agents des administrations locales dans cette commission. C’est pourquoi je ne reviendrai pas sur la réforme Daerden et son impact sur les finances locales. C’est pourquoi je ne reviendrai pas sur le fait qu’aucun de mes prédécesseurs n’avait jamais souhaité mettre les mains dans le cambouis « pension des pouvoirs locaux » et que je ne reviendrai pas non plus sur mes différentes actions en la matière en moins d’une année : la mise en place d’une task force, l’autorisation pour les pouvoirs locaux d’inscrire la cotisation de responsabilisation aux exercices antérieurs, la mise en place d’un cadre réglementaire pour la mise à disposition d’aides régionale à dix et 20 ans ou encore 40 millions d’euros pour les pensions complémentaires des agents contractuels des pouvoirs locaux.

Je ne reviendrai pas non plus sur les commentaires de l’Union des Villes et Communes qui accueillent avec une véritable satisfaction une de ses revendications historiques concernant la mise en place de la pension mixte et soutient pleinement cette généralisation du second pilier qui doit permettre d’atténuer la différence entre le niveau de pension locale selon que l’on termine sa carrière en qualité de contractuel ou de statutaire ; ou encore qu’un autre motif de satisfaction tient à la prise en compte par l’autorité régionale de la nécessité d’adopter des mesures visant à aider les autorités locales wallonnes à supporter la charge des pensions. Force est de constater qu’une prise de conscience a eu lieu au sein des différents niveaux de pouvoir sur la nécessité d’accompagner les pouvoirs locaux dans ce domaine.

Concernant ma circulaire du 29 juin dernier relative à la mise en place et/ou au développement d’un second pilier de pension pour le personnel contractuel, vous avez raison : l’une des conditions pour qu’un pouvoir local puisse bénéficier de la prime régionale est qu’il ait sollicité auprès d’un expert indépendant une étude complète et personnalisée portant sur l’évaluation actuelle et future de sa charge de pension. Tout municipaliste qui se respecte sait que ce type d’études est courant au sein des pouvoirs locaux et tend à se multiplier spécifiquement depuis 2012.

Nous n’avons ici rien inventé et laissons le pouvoir communal, en toute autonomie, s’adjoindre les services d’un expert en la matière.

Néanmoins, j’ai chargé mon administration de mettre à disposition des pouvoirs locaux un modèle type de cahier spécial des charges afin qu’ils soient orientés dans les informations qui devront être a minima disponibles dans ladite étude.

Le but de ce type d’étude n’est aucunement de surcharger administrativement le pouvoir local ou encore de le décourager de solliciter la prime. Le but est qu’il y ait une réflexion du pouvoir local quant à l’opportunité ou non de développer un second pilier pension.

Étant donné ses caractéristiques propres, je ne souhaite pas que, parce qu’il y a une prime, un pouvoir local se lance dans l’aventure sans une réelle réflexion à moyen et long terme et que, in fine, cela impact négativement ses finances locales. Le plan wallon se veut triennal et commence en 2019. Je souhaite donc que les organes décisionnels des pouvoirs locaux profitent de la première année de la mandature pour lancer une véritable réflexion de fond en la matière.

Concernant le profil des experts qui seraient amenés à réaliser l’étude requise pour l’obtention de la prime régionale, mon intention n’est pas de cadenasser les pouvoirs locaux dans leurs démarches. Il me semble néanmoins logique qu’une expertise en outil d’épargne et d’assurance ainsi qu’en finances publiques est le minimum requis afin de garantir aux pouvoirs locaux un état des lieux et des projections les plus fiables possibles quant à leur charge des pensions, l’évolution de ces dernières et leur impact sur leur situation financière à court, moyen et long terme. Ma volonté n’est donc pas de prévoir une quelconque habilitation ou obligation pour les pouvoirs locaux de faire appel à des réviseurs d’entreprises ou à tout autre type de prestataires. Outre l’appel au bon sens et bien évidemment au respect de la mise en concurrence par procédures de marchés publics, je laisse donc à l’autorité locale le soin de mener cette démarche en toute autonomie et me remets à son jugement quant à l’objectivité avec laquelle l’étude sera exécutée.

Concernant les pouvoirs locaux ayant déjà eu recours à ce type d’étude dans un passé récent – donc début 2018 ou l’année 2017 – je n’obligerais pas automatiquement le recours à une nouvelle étude laissant le soin à mon administration, après analyse, de préciser au pouvoir local ses obligations en la matière.

Cependant, force est de constater que beaucoup de paramètres ont été récemment modifiés : la carrière mixte, la suppression de la cotisation de régularisation, l’intervention financière de l’État fédéral dans le Fonds de pensions solidarisées, l’incitants financiers fédéral, la prime régionale, et cetera. Donc, les projections réalisées pourraient être obsolètes.

Par ailleurs, concernant le coût de cette étude et une éventuelle prise en charge de celui-ci par la Région, ce prérequis à l’obtention de la prime régionale peut bien sûr avoir un coup et est assumé par la Région étant donné le mécanisme de prime d’un montant non négligeable pour un investissement que le pouvoir local choisit de réaliser.

Enfin, pour votre parfaite information, la semaine dernière fut l’occasion pour mon cabinet et mes administrations de donner plusieurs séances d’information aux pouvoirs locaux, d’une part, sur les circulaires budgétaires 2019 et, d’autre part, sur la circulaire relative à la prime pension. Nous avons pu détailler le mécanisme et répondre à l’ensemble des questions y relatives. Le taux de participation est des plus satisfaisants, puisque pas moins de 250 mandataires et grades légaux ont répondus à l’appel.

En outre, la circulaire a été présentée et accueillie positivement au comité C de ce vendredi 13 juillet.

le Président. – La parole est à M. Luperto.

Luperto (PS). – Je ne reviendrai pas sur l’historique du dossier, pas plus que je ne reviendrai sur l’ensemble des contre-arguments que j’ai pu aligner à l’ensemble de vos arguments au cours des mois qui nous ont vu ferrailler sur cet important dossier. Je ne reviendrai pas non plus sur ma conviction qu’il y avait d’autres voies possibles pour répondre aux difficultés qui se posaient incontestablement dans le financement à court, moyen et long terme des pensions, dans les pouvoirs locaux notamment, et qu’il s’agit de réponses de nature idéologique qui ont été formulées essentiellement avec cette vision très idéologique du dossier et pas nécessairement avec une volonté de préserver les pouvoirs locaux et leur financement.

J’entends par ailleurs les réponses qui sont formulées quant aux experts indépendants qu’il est permis de désigner, auxquels il est permis de recourir dans les pouvoirs locaux.

J’entends l’initiative d’un cahier de charges type fourni aux communes. Je pense que c’est une heureuse idée.

J’entends qu’il ne s’agit pas d’une tentative de dissuasion des pouvoirs locaux de recourir à la prime pas une surcharge administrative et des exigences qui rendraient compliqué le le bénéfice de l’aide régionale.

Je ne demande qu’à voir dans le futur.

Je me demande tout de même pourquoi il n’a pas été recouru aux services du CRAC pour objectiver un certain nombre d’éléments chiffrés en regard des pensions, compte tenu de leur bonne connaissance d’un grand nombre de situations dans les pouvoirs locaux.

C.R.A.C. N° 189 – Lundi 16 juillet 2018