La rébellion des provinces face au projet du Gouvernement envisageant leur suppression

Question d’actualité de M. Courard à Mme De Bue, Ministre des Pouvoirs locaux, du Logement et des Infrastructures sportives, sur « La rébellion des provinces face au projet du Gouvernement envisageant leur suppression »

le Président. – L’ordre du jour appelle la question d’actualité de M. Courard à Mme De Bue, Ministre des Pouvoirs locaux, du Logement et des Infrastructures sportives, sur « la rébellion des provinces face au projet du Gouvernement envisageant leur suppression ».

La parole est à M. Courard pour poser sa question.

Courard (PS). – Madame la Ministre, j’aurais pu adresser ma question au ministre-président, puisque c’est également un spécialiste et un grand défenseur des provinces, tout comme son collègue René Collin, en tout cas au Luxembourg. Cependant, étant ministre de tutelle, je voulais vous poser cette question.

On sait que votre accord de majorité ne laisse pas la part belle à la province puisque l’on annonce sa disparition. M. Chastel a confirmé à la télévision, à la radio, dans les journaux, au congrès du MR : « On ne veut plus des provinces. » On ne veut plus de ce pouvoir de proximité qui rend pourtant des services de proximité. Je pourrais énumérer toutes les provinces et toutes les actions qui sont faites au service du citoyen, que ce soit en soins de santé, que ce soit dans le social, que ce soit dans le sport et l’enseignement, pour reprendre des points forts notamment du Hainaut, du Brabant wallon. Je pensais plus particulièrement à Liège. Qu’allons-nous faire ?

Je voudrais que l’on se détermine. Les gens ont besoin de clarté, ont besoin de savoir si, oui ou non, demain nos provinces existeront encore, si oui ou non ces services de proximité seront encore rendus.

Vous êtes dans un gouvernement avec un ministre-président, avec d’autres ministres qui sont attentifs à la situation, le discours devrait devenir clair. Il faut savoir si ce Gouvernement veut absolument ce changement, cette fin des provinces, cette disparition et les conséquences que cela va engendrer, que ce soit sur le personnel provincial, que ce soit pour les services de proximité rendus ou si c’est un effet d’annonce comme on en fait beaucoup en politique, qui ne sera pas suivi de conséquences. J’aimerais vous entendre là, parce que clairement des questions se posent.

En tant que Luxembourgeois, Vivalia 2025, c’est aujourd’hui ou prochainement qu’il faut se déterminer. Il faudra donc dire aux communes luxembourgeoises que le déficit sera à prendre en charge à la place des 53 % de la province. Il faudra dire clairement à vos amis de Namur qu’il ne faut pas construire le centre administratif de 25 millions d’euros, si l’on supprime la province.

C’est quelque chose qui paraît évident, ce serait de la bonne gestion.

Ils se sont révoltés, notamment vos amis du Namurois. Ils ont critiqué le manque de réflexion du Gouvernement et des partis en la matière, notamment à l’occasion de l’analyse du budget. J’aimerais vous entendre sur la suite que vous souhaitez réserver à cela.

le Président. – La parole est à Mme la Ministre De Bue.

Mme De Bue, Ministre des Pouvoirs locaux, du Logement et des Infrastructures sportives. – Monsieur le Député, la réforme des provinces, on en parle depuis plus de 20 ans. Tous les citoyens savent que notre paysage institutionnel est très complexe. Au fil du temps, on a rajouté des couches sans vraiment en supprimer. C’est vrai qu’entre la commune, la Région et le Fédéral, il y a les provinces, il y a aussi les intercommunales, la supracommunalité, toutes ces initiatives qui naissent et qui ne sont pas encore encadrées.

La DPR, et c’est aussi ce qu’attendent nos citoyens, veut rationaliser et simplifier nos institutions justement pour que les services soient rendus de manière plus efficace et de manière moins couteuse. Je crois que notre DPR, au contraire, est très claire au sujet de la réforme des provinces. Elle décrit trois étapes.

Premièrement, nous avons affirmé que les services qui sont actuellement rendus par les provinces – vous parlez de services hospitaliers ou de services d’enseignement – seront rendus par le personnel concerné.

Deuxièmement, nous allons étudier finement, et nous sommes en train de le faire, quel est le niveau de pouvoir qui sera le mieux à même de rencontrer ces services, donc quelles compétences attribuer soit à la commune, aux associations de communes ou à la Région. Nous sommes occupés de le faire et nous le faisons d’ailleurs en concertation, cela se fait de manière très conviviale et objective, avec les différentes provinces concernées.

À terme, notre DPR affirme bien que nous allons accroître le rôle des gouverneurs pour supprimer le collège provincial et remplacer le conseil provincial par des représentants des communes.

Je pense que c’est on ne peut plus clair. La feuille de route est là, les services seront rendus. On ne sait pas encore par quel niveau de pouvoir, mais nous y travaillons. Je peux vous dire que cela se fait en concertation avec les différents collèges provinciaux, qu’un agenda de travail a été établi. En tout cas, c’est la direction dans laquelle nous voulons aller.

le Président. – La parole est à M. Courard.Courard (PS). – Tout d’abord, je voudrais vous répondre que la province est la plus vieille institution, puisqu’elle a été consacrée à la Constitution en 1830.

Quand on dit que l’on a ajouté des couches de lasagne, la province était sans doute la première couche de lasagne.

Cela reste un pouvoir de proximité. Je ne vous ai pas entendu parler de suppression. Cela me rassure. Je suppose que notamment l’investissement de 25 millions d’euros pour la Province de Namur dans le bâtiment administratif sera évidemment accordé.

Mais au-delà de cela, j’ai quand même beaucoup d’inquiétudes parce que la province, au-delà du symbolisme de la province, ce sont des services, c’est de la proximité, c’est du social, c’est un service d’aides familiales au niveau de Namur, c’est de l’enseignement de grande qualité dans le Brabant, dans le Hainaut, sur Liège, ce sont des activités sportives qui n’auraient jamais eu lieu dans notre Wallonie si la Province de Liège n’avait pas été dynamique en la matière. Ce sont des services de santé en Luxembourg qui sont importants. Et c’est une attention à la personne handicapée qui sans les provinces serait évidemment en difficulté dans beaucoup d’endroits de notre Wallonie.

Simplifier, changer, modifier, d’accord, mais supprimer certainement pas. Je voudrais que l’on tienne un autre discours et plus celui de dire : « C’est la dernière fois que l’on ira voter en 2018 pour ce pouvoir de proximité qu’est la province ».

CRA N° 5 (2017-2018) – Jeudi 16 novembre 2017