Le 4 février 2021, l’APW a rendu, au Ministre Collignon, un avis sur l’avant-projet de décret modifiant certaines dispositions du Code de la Démocratie locale et de la Décentralisation en vue de permettre les réunions à distance des organes et son avant-projet d’arrêté.
Sur l’avant-projet de décret
Dans un premier temps, l’Association des Provinces wallonnes estime devoir formuler plusieurs considérations au sujet de l’avant-projet de décret.
Sur la forme, le texte en projet opère un renvoi aux articles ajoutés dans une nouvelle partie du Code, cela nous semble tout à fait pertinent. En effet, la création d’un chapitre indépendant permet d’éviter les redites Communes/Provinces et d’éventuelles disparités dans la formulation et les termes utilisés.
Au niveau du Conseil provincial, l’article L6511-2 dispose que les réunions peuvent se tenir à distance en cas d’ « urgence » ou en raison de « circonstances impérieuses et imprévues » motivées. On peut s’interroger sur la pertinence du caractère « urgent » au sein de cette instance dont les dates de réunion sont planifiées annuellement afin de permettre aux intervenants de s’organiser. Il est très rare, voire exceptionnel, qu’une réunion supplémentaire du Conseil provincial soit ajoutée en urgence. Quant à la référence aux « circonstances impérieuses et imprévues », il pourrait être utile de les définir même si l’exercice n’est pas aisé. L’objectif étant de ne pas restreindre les possibilités d’organiser des réunions à distance.
Au niveau du Collège provincial, les Provinces wallonnes regrettent profondément l’impossibilité de prévoir des réunions mixtes (présentielle et à distance). Lors des discussions en groupe de travail, l’avant-projet de décret autorisait expressément la tenue de réunions hybrides avant d’être supprimée dans sa dernière version. Il s’agit d’un revirement malheureux car ce mode de réunion constitue l’une des plus-values de la réforme. D’autant que l’efficacité de ce modèle a été démontrée à maintes reprises au cours de la crise sanitaire que nous traversons actuellement.
En effet, la mixité des réunions permet la flexibilité et, dès lors, davantage d’efficience de l’Institution. Le mandataire qui serait uniquement dans l’incapacité de se déplacer se voit alors privé d’assister à la réunion de son instance alors que les nouveaux moyens de télécommunication sont disponibles pour faire entendre sa voix.
En outre, nous souhaiterions avoir des précisions sur un dernier élément qui nous interpelle dans le projet de décret. Pour des raisons légitimes, lors des Conseils et Collèges à distance, les points relatifs à la situation disciplinaire de membres du personnel ne peuvent faire l’objet « d’une discussion ou d’un vote ». La « discussion » et le « vote » incluent-ils les auditions disciplinaires ? Ou, à l’inverse, doit-on comprendre qu’une audition disciplinaire à distance reste possible ? Le texte semble laisser une zone d’ombre et mériterait d’être clarifié sur ce point.
Sur l’avant-projet d’arrêté
Dans un second temps, l’Association des Provinces wallonnes tient à émettre quelques observations sur l’avant-projet d’arrêté.
Concernant « l’outil numérique » dont question à l’article 2 §5 du texte en projet, la Région wallonne projette-t-elle de créer une application au profit des Pouvoirs locaux ? Cette question est pertinente dans la mesure où les Provinces ne bénéficient pas, à regret, du subside de dix millions d’euros accordé aux Communes et CPAS. Dès lors, à moins de développer notre propre application informatique ou de disposer d’un outil garanti par la Région, les Provinces wallonnes sont, à l’heure actuelle, contraintes de recourir aux plateformes existantes (Zoom, Teams, Jitsi…).
Dans ce même article, « l’identification certaine du membre de l’organe pendant toute la durée de la réunion » pose question même si son utilité n’est pas remise en cause. À cet égard, nous suggérons d’interdire les « écrans noirs » afin de garantir l’identification. Cela étant, il demeure difficile de vérifier la présence constante des mandataires qui, au vu de leur nombre, n’apparaissent pas tous à l’écran. Du côté des Provinces, il pourrait être prévu que les Députés provinciaux, les Chefs de groupe et le Directeur général figurent, à tout le moins, en première page à l’écran.
L’article 2 §7 de l’avant-projet d’arrêté prévoit que « lors du prononcé du huis clos et à la demande du Président de séance, chaque membre s’engage individuellement et à haute voix au respect des conditions (…) ». L’Association des Provinces wallonnes propose de supprimer la mention « et à haute voix » afin d’éviter d’alourdir le déroulé du Conseil provincial. Il existe d’autres moyens permettant aux membres de s’engager à respecter le secret des débats durant le huis clos comme, par exemple, l’envoi d’un mail au Directeur général.
Concernant l’anonymisation des votes au scrutin secret prévu à l’article 5 du texte en projet, nous nous permettons de revenir sur les avantages qui seraient liés à l’élaboration d’une application par la Région wallonne. La mise en place d’une application au profit des Pouvoirs locaux serait une solution idéale qui permettrait, non seulement, de recueillir les votes des intervenants mais également d’assurer leur anonymisation.
À l’heure actuelle, l’avant-projet d’arrêté indique que les votes secrets sont adressés « par voie électronique » au Directeur général en ce qui concerne les Provinces. A ce sujet, nous nous permettons de faire un parallèle avec le prescrit du décret du 1er octobre 2020 organisant les réunions des organes communaux et provinciaux jusqu’au 31 mars 2021. Celui-ci prévoit que le Directeur général vielle à la légalité du processus de décision « par voie électronique, par le biais de son adresse électronique ». Partant du constat que le texte en projet ne fait plus référence qu’à la « voie électronique » (et non à l’« adresse électronique »), peut-on considérer que la Région wallonne étend le champ des possibilités à d’autres outils informatiques ? Dans l’affirmative, il pourrait être opportun de compléter l’article en précisant ce qu’on entend par « voie électronique » (courriel, plateforme sécurisée et/ou outils numériques sécurisés du type Zoom).
Après avoir confié cette mission d’anonymisation au Directeur général, l’avant-projet d’arrêté dispose que « le règlement d’ordre intérieur peut prévoir d’autres modalités de vote au scrutin secret ». En ce sens, une délégation du Directeur général pourrait être envisagée afin qu’il puisse confier cette tâche à un Député mandaté par le Collège ou le Conseil provincial. Le cas échant, on pourrait également prévoir la possibilité, pour chaque groupe politique, de désigner un témoin assistant à cette « procédure d’anonymisation » si tel est son souhait.
Enfin, concernant la diffusion en direct de la partie publique de la réunion à distance sur le site internet de l’institution, il conviendrait de trancher la question de l’obligation ou non de rediffuser ces vidéos. Sans oublier de trouver le moyen d’assurer le respect du RGPD envers les agents provinciaux lors du Conseil (hors mandat public).